Le “Notre Père” du Prophète Muhammad (paix et bénédictions sur lui) ?! Sâlik al-Hanîf Création : 31/08/2011 Modification : 31/01/2012 Certains islamophobes arabophones (qui sont très mauvais dans le débat rhétorique et je n’ai pas envie de leur faire de la publicité inutile) prétendent qu’il existe une prière musulmane qui aurait été plagiée des sources chrétiennes, de la Bible plus particulièrement. Nous y lisons en effet cette prière de Jésus (paix sur lui), qui aurait enseigné le très célèbre “Pater Noster” : « Vous donc, priez ainsi : Notre Père qui es dans les cieux, que ton nom soit sanctifié ; que ton règne vienne ; que ta volonté soit faite, comme dans le ciel, aussi sur la terre. Donne-nous aujourd’hui le pain qu’il nous faut ; et remets-nous nos dettes, comme nous aussi nous remettons à nos débiteurs ; et ne nous induis pas en tentation, mais délivre-nous du mal. Car c'est à toi qu'appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen! » (Louis Segond 1910, Matthieu 6,9-13) En version arabe, traduction Van Dyke :
فصلّوا انتم هكذا ابانا الذي في السموات. ليتقدس اسمك ليأت ملكوتك لتكن مشيئتك كما في السماء كذلك على الارض خبزنا كفافنا اعطنا اليوم واغفر لنا ذنوبنا كما نغفر نحن ايضا للمذنبين الينا ولا تدخلنا في تجربة لكن نجنا من الشرير. لان لك الملك والقوة والمجد الى الابد. آمين. Ainsi, ces personnes prétendent que les musulmans ont plagié cette prière. Pour cela, ils se servent d’un Hadîth (une tradition Prophétique), apparaissant dans les Sounan d’Aboû Dawoûd. Citons le texte et ensuite commentons-le : حدثنا يزيد بن خالد بن موهب الرملي، ثنا الليث، عن زياد بن محمد، عن محمد بن كعب القرظي، عن فضالة بن عبيد، عن أبي الدرداء قال: سمعت رسول اللّه صلى اللّه عليه وسلم يقول: "من اشتكى منكم شيئاً أو اشتكاه أخٌ له فليقل: ربُّنا اللّه الذي في السماء تقدس اسمك، أمرك في السماء والأرض، كما رحمتك في السماء، فاجعل رحمتك في الأرض [كما رحمتك في السماء] اغفر لنا حُوبنا وخطايانا، أنت رب الطيبين، أنزل رحمةً من رحمتك وشفاءً من شفائك على هذا الوجع فيبرأ. « Notre Seigneur Allah qui est dans le ciel, Ton Nom s’est glorifié, Ton Autorité est dans le ciel et sur la terre, comme Ta Miséricorde est dans le ciel. Fais qu’elle soit sur terre, Pardonne-nous nos fautes et nos péchés, Toi, le Seigneur des vertueux, fais descendre une de Tes Miséricordes et un de Tes Soins sur ce mal pour qu’il guérisse. » (Sounan Aboû Dawoûd, 4/16 – Hadith n°3892)
en rouge nous avons indiqué les rapporteurs qui posent problème, ceci sera détaillé un peu plus loin. Il est vrai que cette “invocation” (et non “prière” au passage, car en Islâm les termes “salât“ et “dou’a” ne sont pas synonymes) ressemble étrangement à celle qu’on retrouve dans la Bible. Cependant, il y a plusieurs remarques à faire, la première c’est que les termes sont tout de même complètement différents. Remettons les deux invocations dans un tableau et regardons les différences :
Le mot “Père” est changé par “Seigneur Allâh”. La miséricorde, les fautes et les péchés n’apparaissent pas dans la version biblique, de même que le pain, les dettes et la tentation n’apparaissent pas dans la version d’Aboû Dawoûd. Sans compter que les conclusions sont complètement différentes... Parler de plagiat est donc un bien grand mot, mais de toute façon, nous pouvons clore ce débat ridicule en quelques mots. Ouvrons une vérification des Sounan d’Aboû Dawoûd effectuée par le Cheikh al-Albânî et voyons voir ce qu’il y a marqué :
Le Hadîth est faible !!! Les musulmans n’ont pas attendu des critiques chrétiens qui ne connaissent rien à la science du Hadîth pour rendre caduc ce texte... Le Cheikh Al-Albâni déclare que ce hadith est “faible” (Da’if) parce qu’il s’y trouve “Zyâd ibn Muhammad”. Ce rapporteur est classé dans la catégorie des "faibles" dans le hadith voire « munkar », c’est-à-dire réprouvé dans le hadîth. Vérifions tout de même que cet individu est bien rejeté dans le hadîth. Il y a beaucoup de livres dans la critique des transmetteurs (al-jarh wat-ta'dîl) qui l'affirment, je ne vais en citer que quelques-uns pour ne pas fatiguer le lecteur. Nous lisons dans Tarîkh al-Kabîr (la Grande Histoire) de l'imâm al-Boukhârî (tome 3, p.446) ceci : Traduction
Notice 1490 : Ziyâd ibn Muhammad - selon Muhammad ibn Ka'b al-Qaradhîyou selon Fadâla ibn 'Oubbayd selon Aboû Dardâ. al-Layth a également rapporté de lui. Il est réprouvé dans le hadîth. Au passage, notez que l'imâm al-Boukhârî cite la même chaîne de transmission qu'on a vu précédemment... De même, Ziyâd ibn Muhammad est rapporté dans le livre "ad-Dou'afâ wal-matroûkîne" (les faibles et les réprouvés dans le hadîth) de l'imâm an-Nasâ'î, p.113 : De même, nous lisons dans l'ouvrage du grand savant de la critique des transmetteurs al-Mizzî (654-742 H.), "Tahzîb al-Kamâl fî Asmâ ar-Rijâl", tome 9 p.533-534, notice 2083 : Traduction Notice 2083 : Ziyâd ibn Muhammad al-Ansârî [...] al-Boukhârî, et an-Nasâ'î et Aboû Hâtim : Il est réprouvé dans le hadîth [mounkar al-hadîth]
Concernant le hadîth tel qu'il est rapporté par l'imâm an-Nasâ'î, la chaîne de transmission comporte des personnes inconnues dont nous n'avons aucune information. Le père de Talq est inconnu, de même que "Younoûss ibn Khabbâb" sur lequel on a parlé. Ces récits sont également rejetés. Quant au hadîth rapporté par l'imâm Ahmad, il est déclaré faible parce qu'il s'y trouve un certain "Aboû Bakr ibn 'Abdullâh ibn Abî Maryam" qui est déclaré "faible" et que les chouyoukh d'après lesquels il cite le hadith ne sont pas cités : ils sont donc inconnus. D'où sont tirées ces informations ? Nous les trouvons citées par le cheikh Shou'ayb al-Arna'oût et le cheikh 'Adîl Mourshid qui ont authentifié le Mousnad de l'imâm Ahmad (tome 39, p.379-381).
Ce hadîth est faible et il est donc rejeté... Conclusion Ainsi, même si plagiat il y a eu, ce n’est pas à mettre sur le compte du Prophète (paix et bénédictions sur lui), car il n’a jamais prononcé ce hadîth. On ne peut donc pas accuser le prophète Muhammad (paix et bénédictions sur lui) de plagier la Bible parce que ceci n'est pas vrai. De plus, le texte n'est pas vraiment identique. Quoi qu'il en soit cette question est réglée. Voilà comment on clôt rapidement ce débat. Maintenant, voici deux "bonus game" bien mérités pour ces chrétiens. Bonus Game 1 : Jésus plagie Jean-Baptiste ? Quand nous lisons les évangiles, nous nous apercevons que Jésus (paix sur lui) aurait été un disciple du Baptiste et qu'il aurait prit son indépendance intellectuelle par la suite. Nous lisons dans l'évangile de Matthieu que Jean-Baptiste prêchait ceci : Matthieu 3, 1-2
En ce temps-là parut Jean Baptiste, prêchant dans le désert de Judée. Il disait: Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche. Et quand Jésus a prit son indépendance, voici ce qu'il dit : Matthieu 4,17
Jésus a même repris les mimiques (insultes) de Jean-Baptiste :Dès ce moment Jésus commença à prêcher, et à dire: Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche. Matthieu 3, 7
Mais, voyant venir à son baptême beaucoup de pharisiens et de sadducéens, il [Jean-Baptiste] leur dit: Races de vipères, qui vous a appris à fuir la colère à venir ? Et on voit Jésus reprendre ce même type d'expression à l'encontre de ses contradicteurs: Matthieu 12, 34
Whoua !!! Quel plagiat ! Posons-nous les bonnes questions, Jésus a-t-il répété les enseignements du Baptiste ? Races de vipères, comment pourriez-vous dire de bonnes choses, méchants comme vous l'êtes ? Car c'est de l'abondance du cœur que la bouche parle. Bonus Game 2 : La Bible plagie la Bible ! Nous allons mettre en parallèle 2 passages de 2 livres différents de la Bible et regarder ce petit jeu de copier-coller qui s'est immiscé dans la soit-disante Parole de Dieu: Synopse dans le livre d'Isaïe et de 2 Rois : (Les seules différences entre ces textes sont indiquées en rouge).
Voici les seules différences textuelles qui existent dans ces 2 longs chapitres de ces 2 livres qui sont indiquées en rouge dans les textes ci-dessus: toutes : absent dans d'Esaïe.
voici ; de nouveau : absent dans d'Esaïe.
Eternel. Dans Esaïe : Eternel des armées. De même verset 32
je te prie ; tu es Dieu : absent dans d'Esaïe.
J'ai entendu : absent dans d'Esaïe.
Messagers, dernier gîte. Dans Esaïe : serviteurs, dernière cime.
étrangères : absent dans d'Esaïe.
Esaïe porte après Sareetser : Ses fils. Quelle conclusion pouvons nous en tirer, hormis le fait que l'un des 2 auteurs a forcément copié l'autre? Il y a quelques ajouts ou suppressions dus à des retouches ou des erreurs de copiste comme
aiment à le rappeler juifs et chrétiens. Dieu a-t-Il pu répéter tous ces
mots à l'identique ? Si oui, nous demandons pour quelle raison ? Pourquoi
avoir fait deux chapitres identiques n'apprenant rien de nouveau aux
croyants ? Pourquoi y a-t-il des différences alors qu'il s'agit de
passages identiques littérairement parlant ? Cet exemple n'est qu'un fragment d'un puzzle de mille pièces.
La Bible fourmille d'exemples comme ceux-là, voir ici pour plus de 400 copier-coller au sein même de la Bible (en 6 parties) :
Wa Allahou a’lam - Dieu Sait mieux ce qu'il en est ! |